L’affiche montre une carte bancaire sur laquelle est imprimé (de la même manière que sur un paquet de cigarettes) un message avertisseur: Payer pour un compte à vue peut nuire à votre santé financière.
Dans un cadre en bas se trouve le texte suivant :
Ouvrez un compte en ligne GRATUIT et profitez de l’action Win For Life. www.ing.be,
suivi par le logo d’ING.
Dans le spot radio une voix masculine dit :
Combien de fois je n’ai pas dit: lundi j’arrête.
Et puis lundi je disais : demain j’arrête.
Et le lendemain c’était : lundi prochain je le fais.
Et là, depuis lundi fini. Fi-ni. Je ne paie plus rien pour mon compte à vue.
Une voix féminine réagit :
Payer pour un compte à vue peut nuire à votre santé financière.
Voix masculine :
Ce n’était pas si dur finalement.
Voix féminine :
Prenez une bonne résolution. Ouvrez votre ING Lion Account gratuit sur ing.be et profitez de notre action Win for Life. Info et conditions sur ing.be.
ING Belgique est une institution financière qui ambitionne clairement de se démarquer de la concurrence en étant accessible, directe et concurrentielle.
Le ton de sa communication commerciale doit donc refléter ce positionnement : impactant et direct, éléments que la banque a naturellement incorporés dans la campagne en question.
L’intention n'était bien évidemment pas de choquer.
L'objectif de la campagne d'affichage était d'attirer l'attention du consommateur sur un avertissement et ceci par un visuel connu et reconnaissable immédiatement par le grand public, à savoir l’avertissement apposé sur les paquets de cigarettes. Ce dernier invite le consommateur à réfléchir aux coûts (éventuels) liés à la gestion de son compte à vue actuel et à une alternative gratuite : l'ING Lion Account, un compte à vue en ligne entièrement gratuit.
Les spots radios quant à eux rappellent ce même avertissement avec un clin d'œil plus humoristique. Ceux-ci mettent en avant les différentes méthodes connues pour arrêter les mauvaises habitudes. Dans le cas qui nous intéresse, il s’agit de la mauvaise habitude de payer pour un compte à vue.
En ce qui concerne le caractère gratuit de l'ING Lion Account, l’annonceur a attiré l’attention sur le fait que ce compte est effectivement gratuit : aucun frais de gestion n’est en effet demandés, les cartes de débit liées au compte sont gratuites et les retraits aux distributeurs ING sont également gratuits. Les seuls frais qui peuvent éventuellement être appliqués ne concernent que l'hypothèse où le client retire des fonds de son ING Lion Account auprès de distributeurs de billets non-ING. ING disposant d'un réseau très étendu de distributeurs de billets, il est parfaitement possible de gérer un tel compte sans jamais retirer des fonds auprès d'un distributeur de billets d'un établissement concurrent. ING veille du reste à signaler ces frais dans sa communication commerciale.
Position Jury en première instance
En ce qui concerne la mention « Payer pour un compte à vue peut nuire à votre santé financière/Betalen voor uw zichtrekening kan uw financiële gezondheid schaden’ sous forme d’un avertissement tel que celui apposé sur les paquets de cigarettes, le Jury a estimé n’avoir pas de remarques à formuler. Il a estimé qu’il est clair qu’il s’agit d’un clin d’oeil qui ne ternit pas les avertissements relatifs au tabac.
En ce qui concerne la mention du caractère gratuit « Ouvrer un compte en ligne gratuit …/Open een gratis online rekening … », le Jury a noté, sur base du courrier de l’annonceur, que la gestion, les cartes de débit et les retraits aux distributeurs ING sont effectivement gratuits. Par contre, dans l’hypothèse où le client retire des fonds de son ING Lion Account auprès des distributeurs de billets non-ING, il lui sera facturé des frais. Il s’agit donc de frais autres que les coûts inévitables liés à la réponse à l’offre et au fait de prendre possession ou livraison du produit. Eu égard à ce qui précède et sur base de l’art. 94/8, 19° de la loi sur les pratiques de commerce (art 91, 20° de la nouvelle loi du 06/04/2010 relative aux pratiques du marché et à la protection du consommateur), le Jury a demandé à l’annonceur de modifer sa publicité pour la rendre conforme à la disposition susmentionnée et entre-temps de ne plus diffuser cette publicité (affiches + spots radio).
L’annonceur a interjeté appel contre la décision du Jury de première instance.
Position de l’annonceur (appel)
ING estime, d’une part, que certains éléments non encore connus du Jury devraient l’amener à revoir sa position et d’autre part, qu’en toute hypothèse, aucun code de conduite ou loi n’a été enfreint.
1. Éléments / pièces probantes non encore connus du JEP
1.1. Le titulaire d’un ING Lion Account n’est pas obligé d’utiliser une carte de banque pour utiliser le compte (cfr. infra, point 2.1.).
1.2. Même s’il effectue des retraits avec une carte de banque, il peut gratuitement effectuer des retraits auprès d’environ 1 457 distributeurs de billets ING (cfr. infra point 2.2.).
1.3. Effectuer des retraits auprès d’un distributeur de billets non-ING constitue une simple option pour le titulaire de ce compte, que rien n’oblige ni même n’incite à utiliser cette option (cfr. point 2.3.).
2. La décision rendue en première instance n’est pas valablement basée sur une législation ou un code de conduite
La décision rendue mentionne l’art. 94/8, 19° de la loi sur les pratiques du commerce, qui prohibe l’utilisation du terme « gratuit » si le consommateur
« doit payer quoi que ce soit d’autre que les coûts inévitables liés à la réponse à l’offre et au fait de prendre possession ou livraison de l’article ».
Or, en l’espèce, le consommateur titulaire d’un ING Lion Account ne « doit » pas payer les frais de 0,05 €, dans la mesure où ceux-ci ne sont applicables que dans la double hypothèse où, d’une part, il décide d’utiliser une carte bancaire liée à ce compte et, d’autre part, il utilise l’option consistant à effectuer des retraits auprès d’un distributeur non-ING.
2.1. Tout d’abord, la publicité évoque la gratuité de l’ING Lion Account, c’est-à-dire d’un compte bancaire (en ligne). Cette gratuité est réelle, puisqu’aucuns frais d’ouverture, de gestion ou de clôture du compte ne sont prévus.
La communication commerciale incriminée ne fait pas état de la gratuité de la carte de banque. Relevons qu’un client peut utiliser et gérer son compte ING Lion Account sans effectuer de tels retraits, mais en recevant et en effectuant des virements via son ordinateur…
2.2. Même si les affiches et spots radio faisaient état de carte bancaire gratuite et/ou de retraits gratuits de billets, quod non, celle-ci est bien gratuite pour le titulaire d’un ING Lion Account et lui permet d’effectuer gratuitement des retraits, et ce auprès des distributeurs de billets ING, soit environ 1.457 en Belgique.
Il est donc parfaitement possible et réaliste que les titulaires d’un ING Lion Account effectuent tous leurs retraits d’espèces auprès de ces 1.457 distributeurs. Il est donc exact que l’ING Lion Account permet d’effectuer gratuitement ces retraits en espèces usuels.
2.3. La possibilité d’effectuer des retraits auprès de distributeurs d’autres banques constitue à nouveau une simple option*, un service complémentaire facultatif que le client n’est nullement obligé, ni même incité à utiliser pour prélever des espèces de son ING Lion Account. Le fait que l’utilisation de cette option soit payante n’enlève rien au caractère « gratuit » de la carte et, a fortiori, du compte en lui-même.
2.4. De plus, le raisonnement tenu par la décision du JEP en première instance conduirait à admettre la gratuité de l’ING Lion Account au cas où – quod non – la banque refuserait de proposer cette option aux titulaires de ce compte, c.-à-d. dans le cas où les retraits auprès de distributeurs non-ING seraient purement et simplement interdits pour les titulaires de ces comptes … .
Défense plaignant
1. L'utilisation d'une carte bancaire est, dans la perception du consommateur, un service fondamental parmi les services liés aux comptes bancaires. La campagne publicitaire d’ING montre des cartes bancaire déguisées en paquets de cigarettes, preuve que pour les consommateurs être titulaire d'un compte bancaire doit impliquer nécessairement la possibilité d'utiliser une carte.
2. C'est bien vrai que rien n’oblige un consommateur à se rendre à des guichets "bancontact" de banques différentes de celles dont il est client. Il faut noter, néanmoins, que la distribution des guichets à Bruxelles (et peut être dans le Royaume entier) est telle que le prélèvement d'argent à travers les terminaux d'autres banques est presque inévitable. Il suffit de voir la carte (ING banques) pour se rendre compte que, par exemple, ING n'est présent que dans la partie orientale de la ville. D'autre part, il est plus que normal de permettre aux clients des autres banques de retirer de l'argent et, depuis quelques années, les banques permettent aux clients de concurrents d'effectuer des retraits (payants): ce qui démontre que les consommateurs, très souvent, ne disposent pas d’un véritable choix quant au guichet qu'ils utilisent.
3. On ne peut pas être d’accord avec ING qui affirme que "Il est donc parfaitement possible et réaliste que les titulaires d’un ING Lion Account effectuent tous leurs retraits d’espèces auprès de ces 1 457 distributeurs." et que " 2.3. La possibilité d’effectuer des retraits auprès de distributeurs d’autres banques constitue à nouveau une simple option*, un service complémentaire facultatif que le client n’est nullement obligé, ni même incité à utiliser pour prélever des espèces".
4. D'autre part, ING est bien conscient que le consommateur doit être au moins formellement informé des coûts liés aux prélèvements d'argents via les "bancontacts" des autres banques. Ces coûts sont indiqués sur les affiches de la campagne dont il est question. Malheureusement, ils ne sont presque pas lisibles, surtout pour les voyageurs qui utilisent les services de la STIB et qui sont exposés à l'impact des messages publicitaires sans avoir le temps de s'arrêter pour lire les contenus à peine visibles des affiches.
5. ING admet donc que, pour des raisons de protection des consommateurs, il est nécessaire d'indiquer les coûts des retraits avec carte bancaire. Par ailleurs, la banque ne tire pas toutes les conséquences logiques de cette observation et réserve à l'indication des coûts une place tout à fait insuffisante.
6. En conclusion, le plaignant estime que la décision du JEP en première instance doit être confirmée et qu’ING doit rendre sa publicité conforme aux règles applicables, pas seulement sur le plan formel mais aussi sur celui du contenu, en donnant des indications lisibles sur les affiches à propos des coûts des services payants.
Position Jury d’appel
I. RECEVABILITÉ
En ce qui concerne la recevabilité de la requête, le Jury a constaté que :
- La requête d’appel (du 11.05.2010) a été introduite à temps, à savoir dans les 5 jours ouvrables suivant la date d’envoi de la décision du Jury de première instance (04.05.2010) ;
- la caution de 100 euros a été versée ;
- la requête d’appel n’apporte pas de nouveaux éléments/pièces probantes qui n’étaient pas encore connus au stade de la procédure en première instance.
Vu qu’il n’est pas satisfait aux conditions de recevabilité telles que prévues à l’art. 5 du règlement du Jury, le Jury d’appel a déclaré la requête d’appel en question irrecevable.
Par conséquent, la décision du Jury de première instance est définitive.
Bien qu’il ne partage pas l’avis du Jury, ni en première instance, ni en appel, l’annonceur a confirmé que la campagne concernée est terminée et qu’instruction a été donnée de retirer les supports concernés.
Rue Bara 175, 1070, Bruxelles, Belgique.
E-mail: info@jep.be
Tel: +32 2 502 70 70