Le spot montre notamment des cyclistes dans un paysage vallonné, une personne qui se plonge dans son bain et tient un verre du produit promu, les cyclistes qui s’attablent autour d’une bière de la marque en question, deux personnes qui s’installent dans des fauteuils en tenant un verre du produit promu et en riant quand leur fauteuil s’enfonce, un couple qui regarde le menu dans un restaurant et le serveur qui leur apporte des verres de bière, des personnes qui jouent aux fléchettes et une serveuse qui en évite une de justesse, des personnes qui allument un feu de camp et trinquent avec un verre de la bière promue.
Ces images sont accompagnées par la voix off et les textes suivants :
« Ouf ! Un petit mot qui veut dire plein de choses... »
« Il y a... Ouf ! Allez-y, vous l'avez bien mérité ! »
« C'est fait ! Ouf ! »
« Ouf ! Un petit rayon de soleil ! »
« Ouf ! Une pause entre potes ! »
« Ouf! Elle ne prend pas de vin.. mais de la Chouffe ! »
« Ouf ! C’était moins une ! »
« Ouf ! Allez, on se prend une Chouffe ! Parce que ça va être bien ! Et ce n’est que le début ! »
Le spot se clôture avec le slogan « Ouf, c’est Chouffe ! », la mention « Une bière brassée avec savoir se déguste avec sagesse » et une image d’une bouteille et d’un verre de la marque.
La plaignante a communiqué que dans les publicités qui ont précédé le film « Spiderman », qu’elle est allée voir avec son fils de 11 ans, cette publicité promeut une boisson alcoolisée. Au vu du public de ce film, composé d’ados et d’enfants, elle a trouvé cette publicité tout à fait déplacée, d’autant plus qu’elle ne mentionnait pas que la consommation d’alcool est déconseillée en dessous de 16 ans et/ou que le savoir des brasseurs belges se déguste avec sagesse et modération.
L’annonceur a souligné que la plainte ne précise pas la/les disposition(s) réglementaire(s) mise(s) en cause mais, au vu de ce qui est reproché, il lui semble que la plainte a trait au respect :
- d’une part, des articles 2.1 et 4.1 de la Convention en matière de publicité et de commercialisation des boissons contenant de l’alcool (ci-après, la « Convention »),
- d'autre part, de l'article 11.1 et Annexe B de la Convention.
- En ce qui concerne la conformité aux articles 2.1 et 4.1 de la Convention :
L’annonceur est très soucieux du respect de la réglementation en matière de publicité, en ce compris de la Convention, et ses équipes marketing reçoivent régulièrement des formations à cet égard. En ce qui concerne les mineurs, sa politique est claire et sans équivoque : ses produits alcoolisés ont un public cible exclusivement majeur et par conséquent, aucune publicité pour ces produits ne peut avoir pour objet de s'adresser aux mineurs. Chaque spot publicitaire fait l’objet d’une réflexion approfondie en interne pour veiller au respect de ce principe. Le spot publicitaire litigieux n’a pas fait exception et respecte pleinement ce principe.
Il se réfère ensuite à la jurisprudence du JEP qui rappelle régulièrement dans ses décisions que le constat d'une infraction aux articles 2.1 et 4.1 « exige bien qu'une publicité ou activité de marketing cible spécifiquement les mineurs d'âge » (AB InBev 11/10/2017, Alken Maes Brasseries 05/06/2019). Autrement dit, il faut une publicité qui vise activement à atteindre les mineurs d'âge.
En l'occurrence, le spot publicitaire litigieux n'avait ni vocation à, ni pour effet de, cibler spécifiquement les mineurs d'âge, que ce soit de par son contenu ou par son mode de communication — et l’annonceur précise que la plainte n'avance aucun élément prouvant le contraire.
Il a précisé que le spot ne met pas en scène des mineurs d'âge ou des personnes présentant des caractéristiques physiques/vestimentaires qui pourraient laisser suggérer le contraire et qu’il ne présente pas davantage des situations auxquelles des mineurs d'âge pourraient s'identifier particulièrement.
Quant à son mode de communication, le spot litigieux est diffusé avant des films qualifiés « tout public » par l'agence marketing en charge de sa diffusion, laquelle tient à jour une liste de films qualifiés « pour enfants » avant lesquels la diffusion de spots publicitaires pour des boissons alcoolisées est proscrite. Ce n'est pas parce « Spider-Man : Across the Spider-Verse » est un dessin animé qu'il s’agit forcément d’un film destiné à un public mineur. Bien au contraire, un des animateurs du film lui-même a indiqué que celui-ci n'était pas un film destiné aux enfants, ce qui est confirmé par la MPAA (Motion Pictures Association of America) qui l'a classé dans la catégorie « accompagnement parental conseillé » en raison, notamment, de scènes de violence et du langage employé. Selon l’annonceur, le fait que des mineurs, accompagnés ou non, aillent néanmoins voir le film, n'a pas pour effet d'en faire un film spécifiquement destiné à un public mineur au sens de la Convention. La destination d'un film n'est de toute évidence pas déterminée par la présence de mineurs, ou non, dans les salles de cinéma lors de sa diffusion. En l'occurrence, le film « Spider-Man : Across the Spider-Verse » n'est pas un film spécifiquement destiné aux mineurs, de sorte que la diffusion du spot publicitaire avant ce film n’était pas contraire à la Convention.
- En ce qui concerne la conformité à l’Annexe B (b) (iii) de la Convention:
Contrairement à ce qu'indique la plainte, le spot publicitaire mentionne bien le slogan éducatif. En revanche, il est désolé de constater que le slogan éducatif ne répond pas à toutes les prescriptions de l'Annexe B(b)(iii), ce dont il a averti son agence marketing qui fait le nécessaire pour rectifier cette erreur au plus vite en augmentant la taille du slogan pour arriver à 5% de la hauteur de l'image.
Il a pris très au sérieux cet incident et travaille à renforcer les formations de ses équipes marketing pour éviter ce type d'erreur à l'avenir.
Le Jury ayant décidé d’examiner des aspects supplémentaires de la publicité, à savoir sa conformité aux articles 3.3 et 3.5 et à l’article 9 de la Convention, il est retourné vers l’annonceur, conformément à l’article 8 de son Règlement.
Concernant la conformité aux articles 3.3 et 3.5 de la Convention, l’annonceur a communiqué que le spot met en avant l'importance de savourer les moments de détente/soulagement (par exemple : après une ascension à vélo, lorsque le soleil pointe le bout de son nez, ou encore lorsque votre rencard partage votre goût pour la bière). Selon lui, le spot ne suggère en revanche certainement pas que la boisson promue serait une condition nécessaire pour savourer ces moments ou - pour reprendre les termes de l’article 3.5 de la Convention - pour « rendre le quotidien plus heureux » ou « créer une ambiance festive ».
À cet égard, il se réfère à des décision du JEP (Alken Maes Brasseries 03/04/2019, Delhaize 31/07/2019 et Van Honsebrouck Brasserie 18/09/2013) et invoque le fait que le Jury rappelle que la Convention « n'interdit (...) nullement de suggérer une ambiance festive », tant que l'alcool n’est pas présenté comme une condition nécessaire à celle-ci.
Il a précisé qu’en l'occurrence, le spot présente certes certaines scènes de convivialité, mais que la bière n’est à aucun moment présentée comme une condition nécessaire à une « ambiance festive », ni davantage à la « réussite sociale ou sexuelle ». Il a communiqué que non seulement ces scènes sont dénuées de toute insinuation sexuelle mais qu’il n'est même pas suggéré que la bière favoriserait les rencontres ou une certaine proximité - ce qui d’ailleurs ne suffirait même pas à conclure qu'il est question de « réussite sociale ou sexuelle ». Selon lui, le spot encourage simplement à savourer l'instant, qu'il soit festif ou non et accompagné d'une bière ou non.
Concernant la conformité à l’article 9 de la Convention, l’annonceur a communiqué que le JEP rappelle régulièrement que le simple fait que des sportifs apparaissent dans les publicités examinées ne constitue pas en soi une violation de la Convention (AB InBev 26/09/2018 et AB InBev 27/06/2018). Il a communiqué que si le spot montre en effet des personnes qui font du sport, c'est uniquement avant de consommer la bière promue - et non l'inverse et que, ce faisant, le spot ne laisse pas penser que l'alcool pourrait influencer d'une quelconque manière les performances sportives.
Le Jury a examiné ce dossier en tenant compte des arguments des parties concernées et dans le cadre de la Convention en matière de publicité et de commercialisation des boissons contenant de l’alcool (ci-après : la Convention).
Il a pris connaissance de la plainte et de la publicité concernée, diffusée au cinéma avant le film « Spider-Man : Across the Spider-Verse ».
Sur ce point, le Jury s’est tout d’abord référé à l’article 11.2 §3 de la Convention qui stipule que toute publicité pour une boisson contenant de l’alcool est interdite lors de la diffusion dans une salle de cinéma d’un film qui vise principalement un public mineur d’âge.
A cet égard, suite à la réponse de l’annonceur, le Jury a bien noté que le film en question a été qualifié de « tout public » et non de film « pour enfants » par l’agence marketing en charge de sa diffusion et que la Motion Pictures Association of America l’a en outre classé dans la catégorie « accompagnement parental conseillé » en raison notamment de scènes de violence et du langage employé.
Selon le Jury, le film concerné est un film grand public qui ne cible pas principalement les mineurs au sens de la disposition susmentionnée.
Par ailleurs, le Jury a également bien noté que l’annonceur a communiqué que, ses produits alcoolisés ayant un public cible exclusivement majeur, leur publicité fait l’objet d’une réflexion approfondie en interne pour veiller à ce qu’elle ne s'adresse pas aux mineurs. En l’occurrence, l’annonceur a mis en avant que le contenu publicitaire ne met pas en scène des mineurs d'âge et ne présente pas de situation à laquelle des mineurs d'âge pourraient s'identifier particulièrement.
Quant au contenu publicitaire, le Jury est d'avis que les éléments visuels et textuels de la publicité concernée ne sont pas de nature à viser spécifiquement les mineurs ou à les avoir comme groupe cible. Quant au mode de communication, il est d’avis que la simple présence de mineurs dans la salle de cinéma ne signifie pas que la publicité cible automatiquement les mineurs.
Sur la base de ce qui précède, le Jury a estimé que la publicité en question ne cible pas les mineurs, ni par son contenu ni par son mode de communication, au sens des articles 2.1 et 4.1 de la Convention.
Ensuite, par rapport aux autres aspects de la publicité non visés dans la plainte, le Jury a constaté que le spot montre différentes scènes de vie et il est d’avis que, même si certaines d’entre elles pourraient suggérer une ambiance festive, la bière n'est à aucun moment présentée comme la condition nécessaire pour créer celle-ci ou pour rendre le quotidien plus heureux.
Il est également d’avis que, dans les scènes de convivialité, la publicité n’associe pas la consommation de la boisson promue à la réussite sociale ou sexuelle.
Le Jury a dès lors estimé que le spot visé n’est pas contraire aux articles 3.3 et 3.5 de la Convention.
En montrant des cyclistes dans l’action, qui se retrouvent ensuite autour d’une bière, la publicité n'indique pas non plus selon lui qu'il y aurait une relation de cause à effet positive entre la consommation du produit promu et les performances sportives.
Le Jury a dès lors estimé que la publicité ne suggère pas que la consommation de boissons alcoolisées influence positivement les performances sportives et n’est donc pas contraire à l'article 9 de la Convention.
A défaut d’infractions aux dispositions légales ou autodisciplinaires, le Jury a estimé n’avoir pas de remarques à formuler sur ces points.
Enfin, concernant la mention du slogan éducatif, le Jury a tout d’abord constaté qu’un slogan est bien présent, contrairement à ce qu’affirme la plainte. Il est néanmoins d’avis que celui-ci, compte tenu de sa taille et de sa couleur, n’est pas clairement distinguable. A cet égard, il a noté que l’annonceur dit avoir fait le nécessaire pour augmenter la taille du slogan pour arriver à 5% de la hauteur de l'image et pour modifier la couleur du slogan pour qu'elle ressorte davantage.
Par ailleurs, le Jury a noté que dans la version en néerlandais, le texte même du slogan n’est pas tout à fait conforme à celui requis par la Convention (« Bier met liefde gebrouwen, drink je met verstand » et non « Ons bier (…) »). Il a dès lors demandé à l’annonceur d’en tenir compte également dans la modification.
L’annonceur a confirmé qu’il tiendra compte de la décision du Jury concernant le slogan éducatif.
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