Le spot montre les images d’une caméra qui se dirige à travers une maison. A l’arrière-plan on entend un enfant qui hurle “non” à plusieurs reprises et qui crie que son papa doit arrêter et doit la laisser tranquille, en même temps on entend un homme qui crie et le son de coups et de cris de douleur. Le spot se termine avec une image d’un living où un couple regarde la télévision en fumant avec deux enfants assis par terre devant la télévision.
Voix-off : “Roken in het bijzijn van kinderen is eigenlijk mishandeling”.
L’annonceur a communiqué que sa campagne vise à améliorer la santé publique et plus précisément à protéger les enfants contre la fumée de tabac. Le spot du VLK n’est pas un spot publicitaire mais une action de sensibilisation en faveur de la santé publique générale: elle est donc inspirée par l’intérêt général.
La plainte 1 concerne le cadre unilatéral (on donnerait l’impression que seuls les pères maltraitent leurs enfants). Selon l’annonceur c’est difficile de bien faire dans ce cas. Supposez qu’on ait remplacé ‘papa’ par ‘maman’ dans ce spot; il y aurait alors probablement eu une plainte de féministes. D’ailleurs, l’image montre aussi bien la femme que l’homme et il est donc clair que la critique de fumer en présence d’enfants est valable pour les hommes comme pour les femmes. Le choix d’un homme dans la première séquence du spot n’affirme rien en matière de ‘genre’ et est simplement dicté par des considérations pratiques.
La plainte 2 concerne les expériences traumatisantes par rapport à la maltraitance d’enfant pendant la jeunesse. L’annonceur craint qu’alors presque plus rien ne soit possible: que faire avec des actions de sensibilisation par rapport à des accidents de route, à la prévention du suicide, à des abus sexuels, à des brimades, etc. ? Si on ne peut plus diffuser cela parce que des spectateurs ressentiraient ceci comme traumatisant parce qu’on a perdu un enfant dans un accident, etc., ça nous mène vraiment trop loin. En outre, l’annonceur pense que ça sera justement l’inverse: il pense que les victimes ou leur famille supporteront de telles actions parce qu’ils veulent attirer l’attention sur de tels problèmes sociaux très pertinents.
La plainte 3 interdit la VLK d’avoir une position sur ce que fumer en présence d’enfants signifie pour elle ("eigenlijk mishandeling "). La VLK a naturellement tous les droits de se prononcer à ce sujet.
Le Jury a pris connaissance du spot qui se termine par les mots “Roken in het bijzijn van kinderen is eigenlijk mishandeling”.
Tout d’abord, en ce qui concerne la plainte selon laquelle on donne l’impression que seuls les pères maltraiteraient leurs enfants, le Jury est d’avis que la voix d’homme utilisée dans le spot vise seulement à évoquer une situation de maltraitance d’enfant en général, sans qu’on doive chercher une autre intention dans le choix d’une voix d’homme plutôt qu’une voix de femme. En outre, le Jury a noté qu’aussi bien le père que la mère sont représentés en train de fumer à la fin du spot. Le Jury a dès lors estimé que le spot ne paraît pas stéréotypé à l’égard des hommes. A défaut d’infraction aux dispositions légales et autodisciplinaires, le Jury a estimé ne pas devoir formuler de remarques sur ce point.
Pour le traitement des deux autres plaintes, le Jury doit tout d’abord se poser la question, conformément à ses règles concernant la publicité non-commerciale, de la mesure dans laquelle le matériel audiovisuel utilisé –très choquant selon le Jury- montre un lien direct avec le but que la campagne cherche à atteindre.
A ce sujet, le Jury est d’avis que le but que l’annonceur cherche à atteindre avec cette campagne est d’influencer l’opinion publique en comparant le fait de fumer en présence d’enfants –un comportement qui n’est pas unanimement rejeté, comme l’a constaté l’annonceur- avec un comportement qui est bien unanimement qualifié de blâmable– à savoir la maltraitance d’enfants.
Le Jury a estimé que le matériel audiovisuel utilisé, de nature choquante, a bien un rapport direct suffisant avec le but poursuivi par la campagne.
Le Jury souhaite exprimer sa compréhension pour le point de vue personnel du plaignant qui argumente que cette campagne peut mener à ce que des victimes de maltraitance revivent ces expériences extrêmement pénibles. Il a toutefois estimé que ceci n’ôte rien au rapport suffisant qu’il a constaté entre le matériel audiovisuel utilisé et le but poursuivi par la campagne et que la campagne ne témoigne pas d’un manque de responsabilité sociale sur ce point.
Enfin, en ce qui concerne la plainte selon laquelle les fumeurs seraient stigmatisés de façon inadmissible par cette campagne, le Jury a également estimé que cet argument n’ôte rien au rapport suffisant qu’il a constaté entre le matériel audiovisuel utilisé et le but poursuivi par la campagne. Le Jury a notamment estimé qu’il est inhérent au but poursuivi que l’annonceur mette sur le même pied le fait de fumer en présence d’enfants et la maltraitance d’enfants.
Bien que le Jury ait dès lors estimé que cette campagne ne contient pas d’infractions aux dispositions légales ou autodisciplinaires qui justifieraient une décision de modification ou d’arrêt, il est néanmoins d’avis que cette campagne frôle les limites de ce qui est éthiquement admissible au niveau de la proportionnalité entre le matériel audiovisuel utilisé, de nature choquante, et le but poursuivi tel que décrit ci-dessus.
Vu qu’une telle forme de communication peut engendrer des réactions négatives auprès du public, comme en témoignent les plaintes très diverses que le Jury a reçues à propos de cette campagne, le Jury a estimé devoir formuler un avis de réserve conformément à l’article 2 de son règlement. Un avis de réserve implique que l’annonceur est libre par rapport à la suite qu’il souhaite y donner.
A défaut d’appel, ce dossier a été clôturé.
L’annonceur a communiqué qu’il n’est pas d’accord avec l’avis du Jury.
L’annonceur n’est notamment pas d’accord avec la position du Jury selon laquelle cette campagne frôle les limites de ce qui est éthiquement acceptable au niveau de la proportionnalité entre le matériel audiovisuel utilisé, de nature choquante, et le but poursuivi.
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