L’affiche contient en haut à gauche le logo de Starcasino.be, avec en dessous le texte « Jeux – Sports ».
A côté, l’image d’une jeune femme nue couchée sur le dos au milieu de billets de banque avec les bras levés derrière la tête, dont les parties génitales et les seins sont recouverts par quelques billets de banque.
En dessous, le slogan « La sensation de gagner ».
1) Selon le plaignant, il s’agit d’une représentation outrageuse de la femme comme femme objet, femme vénale, femme corps, femme récompense sexuelle.
2) Le plaignant souligne que, comme à de nombreuses reprises, l’annonceur utilise une image dégradante de la femme. Ici, le slogan utilisé, associé à une femme nue couchée et recouverte d’argent, sexualise l’image de la femme à outrance. Il n'y a ici selon lui aucune autre utilité à la nudité que de faire un jeu de mot sur « gagner », qui rabaisse notamment la femme à un objet que l’on peut gagner. Il se demande si, en 2018, on peut encore accepter ce genre de publicité dans un lieu public et constate que cet annonceur continue sans prendre en considération les précédentes décisions du JEP.
3) Selon la plaignante, il s’agit d’une publicité sexiste qui objectifie le corps de la femme. La femme est nue et cela n’a aucun rapport avec le sujet de la publicité.
4) La plaignante trouve la publicité totalement sexiste, avec une femme apparaissant en femme objet qui serait un gain (contexte de jeu de hasard), nue et dont les parties intimes sont recouvertes de billets, comme si de tels jeux permettaient de gagner une femme, nue qui plus est.
5) Selon la plaignante, ce genre de publicité véhicule des valeurs de réussite et de pouvoirs faciles illustrés par la domination d’une femme-objet « à disposition » et futile dans son amour idiot d’un argent disséminé sur son corps. La plaignante est convaincue de l’importance d’une image de femme libérée, forte et indépendante dans les médias comme possible inspiration pour les femmes et l’image de la publicité va à l’encontre de tout cela : la femme est, comme les billets gagnés, à disposition, bêtement heureuse et sans intention propre.
6) Selon le plaignant, il s’agit d’une image dégradante de la femme, nue, recouverte de billets, qui promeut une association entre la nudité d’une femme avec un gain monétaire, laissant penser que toutes les femmes se prostituent.
7) La plaignante est d’avis que l’image de la femme est utilisée comme objet de séduction ou simplement pour attirer les regards dans le métro. La femme est donc réduite à un rôle sexuel. Elle suppose que la publicité ne s’adresse qu’aux hommes, sinon un homme nu avec des billets cachant son sexe aurait été affiché.
8) Selon la plaignante, Starcasino utilise à nouveau le corps de la femme en tant qu’objet sexuel alors qu’il n’y a aucun lien avec le produit vendu. L’image presque pornographique est de l’objectification sexuelle sous une forme plus pure que ne l’était la publicité avec Pommeline. Selon elle, c’est de la pure provocation parce qu’ils savent qu’ils peuvent se permettre ce genre d’image en toute impunité.
9) Selon la plaignante, il s’agit d’une mise en scène dégradante où la femme est présentée comme un objet sexuel au caractère vénal. La pose est suggestive et la nudité choquante pour de l'affichage tout public. Cette affiche est selon lui clairement sexiste et entretient des stéréotypes/préjugés qui ne peuvent pas être tolérés.
10) En tant que femme, la plaignante trouve la publicité extrêmement dénigrante et ne comprend pas non plus le lien entre les paris et une femme nue. La publicité pour les paris ne vise-t-elle que les hommes ? De plus, elle trouve que le fait que l’annonceur nie les critiques précédentes est très problématique.
Plusieurs plaintes supplémentaires de même nature/portée n’ont pas été traitées séparément, conformément à l’article 5, alinéa 5 du Règlement du JEP. Au total, le Jury a reçu 39 plaintes relatives à la publicité en question.
L'annonceur a tout d'abord noté que :
Selon lui, l'affiche ne représente pas la femme comme un objet de désir qui "est disponible", mais au contraire comme une gagnante, comme quelqu'un exprimant sa joie suite à une participation réussie à un jeu de hasard. Ceci est souligné en termes non équivoques par le titre de l'affiche : "het gevoel van winnen" / "la sensation de gagner".
L'image symbolise la libération des soucis matériels que l'argent peut engendrer, en utilisant l'image de quelqu'un qui « nage dans l'argent » (on ne nage pas avec des vêtements), grâce à une participation réussie à un jeu de hasard. Il s'ensuit également qu'il existe bien un lien entre l'image sur l'affiche d'une part et les services de l'annonceur d'autre part.
Selon l'annonceur, l'affiche non seulement ne viole aucune règle juridique, mais elle ne viole aucune disposition du Code ICC ou des règles de JEP.
Dans la mesure où l'affiche serait examinée par rapport à l'article 4, alinéa 1 et à l'article 12 du code ICC, et au point 3 des Règles du JEP relatives à la représentation de la personne humaine - que le JEP avait à l'époque considéré comme violés par la première affiche "Pommeline" de Starcasino - l'annonceur a fait valoir ce qui suit.
Il ne voit pas comment l'affiche encouragerait ou tolérerait la discrimination fondée sur le sexe.
On ne peut pas non plus affirmer sérieusement que l'affiche porte atteinte à la «dignité humaine». D'ailleurs, le regard de la femme n'est nullement celui d'une «séductrice» (comme le suggèrent les plaignants) mais celui de quelqu'un qui profite de sa propre chance, dont c’est le tour. Il ne peut donc être question d’infraction à la dignité humaine, d'autant plus que, comme on l'a dit, aucune partie intime n'est montrée, même partiellement.
Selon lui, il ne serait pas sérieux de dire que l'image d'une femme qui «nage dans l'argent» grâce à sa participation à un jeu de hasard, dénigre, ridiculise ou discrédite la personne concernée - ou, par extension, la femme en général.
L'affiche ne peut pas non plus être interprétée comme une expression de «mépris», de «méfiance» ou de «moquerie» (dire le contraire impliquerait que Starcasino s’exprime de manière négative à propos de ses propres services, ce que personne ne prétend).
Le Jury a examiné la publicité en question en tenant compte des arguments des plaignants et de l’annonceur.
Le Jury a constaté que l’affiche avec le slogan "La sensation de gagner" montre l’image d’une femme nue couchée sur le dos au milieu de billets de banque avec les bras levés derrière la tête et quelques parties du corps recouvertes de billets.
En ce qui concerne le slogan "La sensation de gagner", illustré par l’image en question, le Jury est d’avis que celui-ci contient une ambivalence en termes de compréhension. Suite à la réponse de l’annonceur, le Jury a noté que selon ce dernier, il est clair que c’est la femme qui éprouve la sensation de gagner et qu’elle exprime sa joie suite à la participation couronnée de succès à un jeux de hasard.
Cette interprétation n’est, selon le Jury, pas la seule à pouvoir découler de la combinaison du slogan et du visuel utilisé, en témoignent entre autres les différentes réactions des plaignants à cet égard.
En tout état de cause, le Jury est d’avis que la publicité en question instrumentalise la femme par rapport à l’appât du gain.
Le Jury est d’avis que l’utilisation de la femme ainsi représentée (que ce soit elle qui éprouve la sensation de gagner ou non) est déplacée pour faire passer un message commercial relatif aux services concernés, à savoir des jeux de hasard, qui ne présentent aucun lien avec le corps de la femme. Le fait que l’image symboliserait la libération de toute préoccupation matérielle grâce à un gain via un jeu de hasard ou qu’elle illustrerait le fait de ‘nager dans l’argent’, comme l’argumente l’annonceur, n’est pas suffisant selon le Jury pour établir de manière plausible un lien entre la manière dont la femme est représentée et les services promus, qui justifierait l’utilisation du visuel concerné.
Il est donc d’avis que la publicité en question exploite ainsi abusivement l’image du corps de la femme.
Le Jury a dès lors estimé que l’image de la femme transmise par la publicité est dénigrante pour la femme et porte atteinte à sa dignité humaine.
Sur la base des articles 4, alinéa 1 et 12 du Code de la Chambre de Commerce Internationale et des points 2, 3 et 4 des Règles du JEP relatives à la représentation de la personne, le Jury a dès lors demandé à l’annonceur de modifier la publicité et à défaut, de ne plus la diffuser.
Par ailleurs, au vu des différentes décisions négatives à l’égard de campagnes d’affichage précédentes de l’annonceur (Starcasino 03/05/2016 (décision en première instance) et Starcasino 15/06/2017 (décision en appel)) et conformément à l’article 9 de son Règlement, le Jury a demandé à l’annonceur de lui soumettre sa prochaine campagne d’affichage pour examen préalable à la diffusion de celle-ci.
L’annonceur a communiqué que la campagne d’affichage en question est terminée.
Conformément au Règlement du Jury, les médias concernés ont été informés de l’application de l’article 9 de telle sorte qu’ils puissent apporter leur collaboration à cette demande.
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