L’annonce présente différents costumes, pour filles à gauche sur fond bleu et jaune et pour femmes à droite sur fond noir. Entre les deux, un « Costume religieuse ou infirmière » avec l’indication « Taille unique ». La femme représentée porte des jarretelles et une mini robe avec un décolleté.
A gauche, différents costumes dont un « Costume de luxe pour fille » avec l’indication « A partir de 3 ans ». La fillette représentée porte une robe d’infirmière et un stéthoscope.
A droite, à côté du texte « Costume adulte pour femme », on voit deux femmes, l’une en robe noire style Charleston et l’autre en tenue de soubrette avec un plumeau.
Le plaignant a renvoyé à une femme adulte avec un costume de « religieuse ou infirmière » et à une autre portant un « costume adulte pour dame » véhiculant les codes de la pornographie sur une page de déguisement de carnaval destinée aux parents et à leurs enfants. Il n’est pas spécifié que le costume de religieuse ou d’infirmière s’adresse aux adultes. De plus, son positionnement sur la page laisse croire que le costume d’infirmière pourrait s’adresser aussi aux enfants et aux adolescents : premièrement, le modèle est autant dans la partie foncée que la partie claire de l’annonce et deuxièmement, alors que la partie foncée est identifiée en page 53 (costumes masculins) comme « adulte », elle ne l’est plus en page 55 (costumes féminins).
Le plaignant a ajouté qu’un enfant porte un « costume de luxe pour fille » similaire à celui de la femme adulte portant le costume d’infirmière sur la même page. Ceci est choquant et oriente explicitement ses choix de consommation vers une connotation pornographique. La petite fille est clairement victime d’une hypersexualisation. Si le costume n’est pas explicitement identifié comme celui d’une « infirmière », il le suggère, et le port de bas résille rouges est un détail qui ne correspond pas vraiment à l’univers hospitalier mais plutôt à celui de la séduction adulte, de l’érotisme, de l’intime, de la pornographie.
Selon le plaignant, cette présentation alimente et renforce les stéréotypes de genre dans le chef des parents et des enfants.
Ces images sont diffusées à travers un magazine toutes-boites susceptible d’atteindre un large public et donc potentiellement de nombreux enfants et adolescents. L’intégration de ces images dans leur développement psycho-social a des conséquences sans précédent sur la légitimation de ces stéréotypes à l’échelle sociale, mettant en cause la responsabilité sociale de ceux les diffusant.
Mélanger des déguisements d’enfants et des costumes qui font appel à l’imaginaire pornographique sur la même page contribue résolument à alimenter négativement les représentations que peuvent avoir les enfants – et leur entourage – des femmes. Autrement dit, ce genre de costumes risquent d’être identifiés par l’enfant, par ses parents et par un public plus large comme étant ceux qu’une femme adulte doit normalement porter.
La normalisation de ces traits esthétiques et identitaires alimente les discriminations liées au genre dont souffrent de nombreuses femmes en société. Alors qu’il faut les combattre, une telle publicité leur confère une dangereuse légitimité, et ce dès l’enfance ainsi qu’au cœur de la relation parents-enfants.
Cela banalise l’image de la « femme-objet », réduisant celle-ci à un objet de consommation et de désir.
Selon le plaignant, cette publicité semble enfreindre plusieurs articles du code ICC (2, 4 et 18).
Il refuse la banalisation des codes pornographiques. Il estime qu’une société commerciale a la responsabilité de respecter certaines règles morales et éthiques, surtout quand le public est constitué d’enfants ou de jeunes en pleine phase de construction de leurs représentations identitaires et sociales.
L’annonceur conteste toute infraction tant aux dispositions réglementaires et légales qu’aux bonnes pratiques professionnelles. La publicité concerne des costumes de carnaval pour lesquels de nombreuses excentricités sont recherchées par les participants. Les photos utilisées dans les publicités sont fournies telles quelles par les fournisseurs de produits et correspondent aux images reprises sur les produits vendus en magasin.
Les liens et amalgames relayés dans la plainte lui semblent excessifs. Aucun élément pornographique n’est présent dans la publicité. L’annonceur conteste fermement toute intention malveillante dans son approche. Son service publicité chargé de la composition des pages est exclusivement composé de femmes, pour certaines mères de famille. Aucune d’elle n’avait considéré qu’une page de costumes de carnaval risquait de contribuer à « alimenter négativement les représentations que peuvent avoir les enfant – et leur entourage – des femmes ». La page précédente de la publicité représente d’ailleurs des déguisements pour hommes avec un prisonnier enchaîné et un policier extrêmement patibulaire. Il ne s’agit pas davantage de la représentation de l’homme vers laquelle quiconque souhaite que les garçons se projettent.
Il ne peut cependant pas nier que si cette plainte existe, c’est que la segmentation entre les déguisements adultes et enfants n’a pas été suffisamment claire dans la mise en page. Il sensibilise ses équipes commerciales et publicitaires sur ce sujet afin de prendre davantage de précautions à l’avenir et de ménager l’ensemble des susceptibilités. Il a en outre adapté la page du folder en ligne qui était accessible via son site afin de supprimer la photo litigieuse de l’infirmière adulte.
L’annonceur vise une communication familiale, grand public et n’a nullement pour intention d’interpeller ou de choquer. L’humour et la dérision sont néanmoins des vecteurs de communication qu’il apprécie, a fortiori pour un folder de carnaval.
Le Jury a pris connaissance de la publicité présentant différents costumes à l’occasion du carnaval et de la plainte qui y a trait.
Le Jury a constaté que la publicité présente à gauche des costumes pour filles et à droite des costumes pour femmes. Entre les deux, une femme est représentée avec des jarretelles et une mini robe décolletée, avec les textes « Costume religieuse ou infirmière » et « Taille unique ». Dans les costumes pour filles, on voit entre autres une fillette avec une robe d’infirmière qui rappelle celle de la femme susmentionnée et un stéthoscope, avec les textes « Costume de luxe pour fille » et « A partir de 3 ans ».
Le Jury a également constaté que dans la partie droite de la publicité, on voit entre autres deux femmes, l’une en robe noire style Charleston et l’autre en tenue de soubrette avec un plumeau.
Le Jury est d’avis que les costumes pour femmes de l’infirmière avec des jarretelles et une mini robe décolletée et de la soubrette sexy font davantage référence au monde adulte de la séduction ou de l’érotisme et comportent des connotations ne convenant pas aux enfants. Le Jury est dès lors d’avis que la juxtaposition des costumes en question et des costumes pour filles est déplacée. Il est également d’avis qu’établir un lien entre le costume adulte de l’infirmière tel que représenté et sa version enfant ne convient pas non plus.
Le Jury a estimé que cette présentation contribue à perpétuer auprès des enfants des images stéréotypées allant à l’encontre de l’évolution de la société au sens du point 4 des Règles du JEP relatives à la représentation de la personne.
Le Jury a également estimé, conformément à l’article 18 du code de la Chambre de Commerce Internationale, qu’un soin particulier doit être mis en œuvre dans la communication commerciale faisant apparaître des enfants et qu’un produit ne convenant pas aux enfants doit être clairement identifié en tant que tel.
Eu égard à ce qui précède et sur la base des dispositions susmentionnées, le Jury a demandé à l’annonceur de modifier la publicité et à défaut de ne plus la diffuser.
L’annonceur a confirmé qu’il respectera la décision du Jury.
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