CENTERPARCS – 01/03/2012

Description de la publicité

Le spot TV montre un homme obèse torse nu, filmé au ralenti, qui salue son voisin en nettoyant sa voiture sur son allée puis s’enduit de crème solaire; il provoque ainsi de fortes réactions chez son voisin.
Voix-off et texte à l’écran : « Het is niet omdat je buurman borsten heeft, dat je ze ook wil zien. »
Texte à l’écran: “Verschil #3. 9 meter brede ramen en toch 100% privacy. Alleen bij Center Parcs.”
Voix-off: “Daarom heeft Center Parcs 9 meter brede ramen en toch 100% privacy. Dat vind je alleen bij Center Parcs. Ontdek alle verschillen op centerparcs.nl.”

Motivation de la plainte

Le plaignant a trouvé le spot très offensant. Un gros homme ne peut pas être vu ; les hôtes sont assurés qu’ils ne seront pas confrontés avec un homme obèse. Le plaignant est lui-même obèse et assure qu’il ne choisit pas de peser ce qu’il pèse. Cela le blesse que des gros soient filmés de cette manière et qu’ils soient tournés en dérision. Qu’ils soient ridiculisés. Le plaignant est certain qu’il n’est pas le seul.

Position de l'annonceur

Tout d’abord, l’annonceur a voulu souligner que la campagne n’a aucunement l’intention d’offenser quelqu’un. C’est une entreprise qui prône l’hospitalité et le respect.
La campagne parle de 29 différences qui font en sorte que des vacances chez l’annonceur sont vraiment parfaites et bien mieux pour le visiteur. Un de ces points est le fait que les cottages sont construits de telle façon qu’on ne peut pas voir chez les voisins. Ceci et le fait que chaque cottage est vraiment au milieu de la nature assure l’intimité et ceci a été illustré par deux spots TV marquants.
Il y a également une campagne radio où d’autres éléments sont développés en utilisant l’humour et des clichés et toutes les différences sont mentionnées sur le site.
L’annonceur a ajouté que son spot ne concerne pas les personnes obèses et ne veut pas contenir d’affirmation à ce propos. Il s’agit d’intimité. Les voisins sont les voisins, et aussi gentils soient-ils, on veut surtout pouvoir profiter de sa propre intimité. L’annonceur a ici représenté cette idée avec l’humour nécessaire. Il a mis l’idée d’intimité en lumière d’une manière différente et très exagérée où il a fait attention à représenter tout le monde de telle sorte que personne ne se sente personnellement visé. Lors du casting de l’homme et de sa manière de jouer, il a été fait en sorte que cet homme ne soit pas représenté comme misérable, mais justement comme joyeux et bien dans sa peau. L’annonceur évalue lui-même aussi les réactions et il remarque que le spot n’est pas perçu comme négatif ou insultant par le spectateur. Tout simplement parce qu’il ne parle pas explicitement des ‘gros’, ce dont il ne s’agit pas du tout ici. Il s’agit des ‘seins de votre voisin’, ce qui est clairement un clin d’œil aux nombreuses blagues sur les voisines. Par la parole et par l’image, l’annonceur a donc pris une position suffisamment éloignée de la réalité. Il aurait aussi bien pu faire un spot sur les enfants ou une voisine. Ils ne devraient alors pas non plus se sentir visés, comme les blondes ne doivent pas se sentir visées par les blagues sur les blondes idiotes.

Décision du Jury

Décision Jury de première instance

Le Jury a pris connaissance du spot TV dans lequel figure un homme obèse qui provoque clairement du dégoût chez son voisin.

Le Jury a pris note du point de vue de l’annonceur selon lequel le spot TV vise à mettre en avant l’aspect intimité de vacances chez l’annonceur.

Bien que le Jury trouve que cet aspect intimité soit en soi un argument de vente valable, il est cependant d’avis qu’il s’agit ici d’une image négative des personnes qui ne répondent pas à une certaine image idéale et ceci, en sus, pour vanter un produit à caractère familial.

Le Jury est d’avis qu’il y a d’autres manières pour mettre en avant l’aspect intimité et a dès lors estimé que la manière choisie par l’annonceur – l’exagération humoristique de la réalité physique des personnes obèses - ne témoigne pas d’un juste sens de la responsabilité sociale et témoigne d’un manque de respect pour la diversité dans la société.

Le Jury a de plus estimé que le spot TV paraît dénigrant pour les personnes obèses.

Pour ces raisons, le Jury a estimé que ce spot TV est contraire aux articles 1, alinéa 2 (principes de base), 4, alinéa 1 (responsabilité sociale) et 12 (dénigrement) du Code de la Chambre de Commerce Internationale (Code ICC).

Compte tenu de ce qui précède et sur base des dispositions susmentionnées, le Jury a demandé à l’annonceur de ne plus diffuser ce spot TV.

L’annonceur a interjeté appel contre la décision du Jury de première instance.

Position annonceur (appel)

En général:

Selon l’annonceur, le Jury de première instance a:
- mal interprété le spot TV ;
- fait une application erronée des articles du code ICC sur lequels la décision est basée.

Dispositions relevantes:

Article 1, alinéa 2 code ICC – Principes élémentaires:
« Toute communication commerciale doit être conçue avec un juste sens de la responsabilité sociale et professionnelle (…). »

Article 4, alinéa 1 code ICC – Responsabilité sociale:
« La communication commerciale doit respecter la dignité humaine et ne doit encourager ou cautionner aucune forme de discrimination, y compris fondée sur la race, l’origine nationale, la religion, le sexe, l’âge, le handicap ou l’orientation sexuelle. »

Article 12 – Dénigrement:
« La communication commerciale ne doit pas dénigrer une quelconque personne ou catégorie de personnes, une entreprise, une organisation, une activité industrielle ou commerciale, une profession ou un produit ou tenter de lui attirer le mépris ou le ridicule public. »

Principes concernant l’interprétation du code ICC:
« Le code ICC consolidé doit être interprété conformément à l’esprit et à la lettre. (…) Les communications doivent (…) être jugées à l’aune de leur influence probable sur le consommateur raisonnable, en tenant compte des caractéristiques du public ciblé et du support utilisé.
La communication commerciale doit être analysée en prenant en
considération les connaissances, l’expérience et la capacité de discrimination du consommateur type auquel elles s’adressent, ainsi que les facteurs sociaux, culturels et linguistiques. (…) Les consommateurs ordinaires sont supposés quant à eux posséder un degré raisonnable d’expérience, de connaissance et de discernement et être raisonnablement observateurs et prudents. »

La motivation proprement dite de l’appel concernant le contenu et l’interprétation du spot TV:

1) En ce qui concerne (le choix du) le spot même :

L’annonceur donne sa propre description de la publicité où il mentionne entre autres que le voisin regarde l’homme torse nu avec beaucoup de surprise ou d’étonnement.
Encore selon l’annonceur, « chaque élément de la campagne est un persiflage clair du cliché de la voisine avec de gros seins, et c’est aussi compris ainsi par le consommateur moyen ».

Il souligne que « le fait qu’une autre expression créative soit possible pour un message n’est (selon lui) pas une raison pour condamner une campagne ».

2) En ce qui concerne l’(ir)responsabilité:

L’annonceur réfute ensuite le fait d’avoir agi de manière irresponsable.

« En tant qu’annonceur responsable, Center Parcs a donc pris quelques mesures pour évaluer le spot TV (…) [validation interne; contrôle externe via un panel quantitatif; évaluation finale ‘real life’ (à l’aide du buzz des médias sociaux) lors de la première diffusion aux Pays-Bas]. »

« Tout cela pour garantir que le spot soit correctement compris et que les gens comprennent le clin d’œil par rapport au cliché de la voisine et interprètent bien le message. »

« S’il y avait eu le moindre signe que le spot aurait pu être mal interprété, ou soit perçu comme « se moquant de », Center Parcs aurait retiré le spot immédiatement. »

De plus, l’annonceur a anticipé sur les plaintes en rédigeant une lettre d’excuse et en contactant chaque plaignant par téléphone. La plupart des plaignants ont accepté les excuses. Le nombre de plaintes était extrêmement limité (39 au total pour les Pays-Bas et la Belgique).

L’annonceur déduit des résultats de ses contrôles « que le spot a atteint le but visé et que le consommateur moyen comprend parfaitement la forme et le message ».
« Surtout en tenant compte de la capacité de jugement du public actuel et de l’expérience sociale actuelle avec le langage visuel et l’humour. »

3) En ce qui concerne la réaction de dégoût (du voisin):

L’annonceur pense que ceci ne ressort pas du spot TV et mentionne que « l’expression étonnée, fascinée et stupéfaite du voisin est inspirée par le comportement de l’(autre) homme ».

Il ressort d’une enquête quantitative auprès d’un groupe cible représentatif que « le message (...) (est) explicitement interprété comme ‘avoir de l’intimité’, ‘avoir de l’espace’, ‘se reposer’, ‘ne pas être incommodé par les voisins’ ».

4) En ce qui concerne l’aspect intimité et le persiflage d’une image idéale stéréotypée:

L’annonceur mentionne que l’importance de l’intimité est mise en avant dans le spot TV.
« L’obésité n’est pas le thème du spot TV et ce n’est certainement pas le but de se moquer de cela.
Le but du spot est de faire un spot humoristique qui montre un persiflage sur les stéréotypes des idéaux de beauté. »

“En montrant un voisin qui ne correspond pas à cette image idéale, mais qui est clairement joyeux, exubérant et heureux et qui n’est donc pas dérangé par le stéréotype de l’image idéale, (…) le spot TV est clairement humoristique, caricatural et le persiflage est clair. ”

Que le groupe cible comprend le persiflage ressort aussi de l’enquête quantitative: « Dans les commentaires spontanés sur la publicité c’est la deuxième raison que les gens donnent pour expliquer pourquoi ils apprécient la publicité ».

« Puisque le (code ICC) part de l’idée du consommateur moyen, nous sommes d’avis que c’est aussi le point de vue de ce consommateur moyen, testé via une étude de marché, qui doit être considéré comme indicateur pour évaluer la communication. »

“L’obésité n’est pas exagérée de manière négative mais est placée de manière positive dans un contexte humoristique de persiflage.
Le persiflage de l’image idéale utilisée trop souvent de modèles idéaux, ne provoque pas de dégoût chez le voisin et n’a pas de but dénigrant, négatif ou humiliant et n’a pas non plus ce contenu.
Au contraire c’est (…) libératoire et émancipateur. (…) L’obésité éventuelle n’a pas de connotation négative; au contraire, le spot TV montre quelqu’un qui n’est pas dérangé par cela, qui se sent bien et qui dégage cela aussi. ”
De recherches propres et d’articles sur la campagne, il ressort que le persiflage est clair.

5) En ce qui concerne la perception du spot TV sur YouTube et Twitter:

Sur YouTube le spot semble “non seulement un succès mais, en partant de l’idée qu’une fraction représentative de la population regarde le spot ainsi que le consommateur concerné, nous ne voyons ici également aucune indication que le consommateur obèse se sente humilié ou dénigré en tant que groupe ”.

Sur Twitter « seule une forte minorité d’environ 4% trouve le personnage principal peu attirant et trouve le spot donc mauvais et il n’y a que « quelques personnes qui sont dérangées par le fait que Center Parcs utilise une personne obèse dans son spot ».

Décision Jury d’appel

I. RECEVABILITÉ

En ce qui concerne la recevabilité de la requête d’appel, le Jury a tout d’abord constaté que:

- la requête (21.02.2012) a été introduite dans les 5 jours ouvrables suivant la date d’envoi de la décision du Jury de première instance (15.02.2012) ;
- la caution a été versée ;
- la requête contient une motivation claire des raisons de l’appel.

Vu ce qui précède, le Jury a déclaré la requête d’appel recevable.

II. QUANT AU FOND

Le Jury d’appel a pris connaissance du contenu du spot TV pour Center Parcs et de tous les éléments et points de vue communiqués dans ce dossier.

Le Jury d’appel est d’avis que dans une scène du spot TV – à savoir celle dans laquelle le voisin fait une grimace quand il voit comment son voisin obèse torse nu lave sa voiture – il y a une réaction du voisin qui peut être interprétée comme du dégoût à l’égard de son voisin obèse.

Le Jury a toutefois estimé que le spot TV dans sa totalité réalise le but visé par l’annonceur de mettre en avant l’aspect d’intimité de vacances chez l’annonceur sans qu’il n’y ait pour le consommateur moyen de création d’une image négative ou d’exagération des personnes qui ne répondent pas à une certaine image idéale. Le Jury a estimé que l’excès de poids éventuel du voisin n’a pas de connotation négative dans ce spot TV, ni par son comportement, ni par les autres réactions de son voisin.

Le Jury d’appel, contrairement au Jury de première instance, a donc estimé que, en tenant compte des principes concernant l’interprétation du code de la Chambre de Commerce Internationale (code ICC) selon lesquels une communication doit être examinée sur base de son impact potentiel sur le consommateur moyen, le spot TV dans sa totalité ne témoigne pas d’un manque de responsabilité sociale ou d’un manque de respect pour la dignité humaine et n’est pas non plus de nature à être dénigrant pour des personnes obèses.

Le Jury d’appel déclare donc l’appel fondé et réforme la décision du Jury de première instance.

Le Jury d’appel a notamment estimé ne devoir formuler qu’un avis de réserve conformément à l’article 2 de son règlement, en ce qui concerne la scène mentionnée ci-dessus dans laquelle le voisin fait une grimace qui peut être interprétée comme du dégoût, et fait ici appel à la responsabilité de l’annonceur.

Un avis de réserve implique que l’annonceur est libre concernant la suite qu’il donne à cet avis.

La décision du Jury d’appel est définitive.

Annonceur:CENTERPARCS
Produit/Service:Vacances
Média:TV
Initiative:Consommateur
Type de décision:Avis de réserve
Date de clôture: 01/03/2012